Licenciement pendant la période de congé maternité

2024-10-04T19:54:18+02:004 octobre 2024|

En application de l’article L. 1225-4 du code du travail, l’employeur ne peut engager une procédure de licenciement pendant la période de congé maternité, notamment en envoyant la lettre de convocation à l’entretien préalable, un tel envoi constituant une mesure préparatoire au licenciement (Soc. 29 novembre 2023, n°22-15.794).

Les circonstances de l’affaire jugée par la chambre sociale le 29 novembre 2023 pour licenciement pendant la période de congé maternité sont d’une grande simplicité.

Une salariée bénéficiait d’un congé maternité suivi de congés payés, de sorte que son contrat de travail était suspendu.

Elle fut convoquée, huit jours avant la date de reprise du travail, à un entretien préalable à son éventuel licenciement pour motif économique, cet entretien devant se tenir environ trois mois plus tard. Quelques semaines après, elle accepta un contrat de sécurisation professionnelle.

Toutefois, cette salariée saisit ensuite un conseil des prud’hommes d’une demande de nullité du licenciement en se fondant sur les dispositions de l’article L. 1225-4 du code du travail, selon lesquelles : « Aucun employeur ne peut rompre le contrat de travail d’une salariée lorsqu’elle est en état de grossesse médicalement constaté, pendant l’intégralité des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles elle a droit au titre du congé de maternité, qu’elle use ou non de ce droit, et au titre des congés payés pris immédiatement après le congé de maternité ainsi que pendant les dix semaines suivant l’expiration de ces périodes.

Toutefois, l’employeur peut rompre le contrat s’il justifie d’une faute grave de l’intéressée, non liée à l’état de grossesse, ou de son impossibilité de maintenir ce contrat pour un motif étranger à la grossesse ou à l’accouchement. Dans ce cas, la rupture du contrat de travail ne peut prendre effet ou être notifiée pendant les périodes de suspension du contrat de travail mentionnées au premier alinéa ».

Ces dispositions prévoient une protection contre le licenciement pendant la période de congé maternité, avec une distinction entre une période de protection absolue et une période de protection relative.

D’une part, l’impossibilité de rompre le contrat compte une limite importante : sauf en cas de fraude ou de vice du consentement, une rupture conventionnelle peut être valablement conclue en application de l’article L. 1237-11 du code du travail au cours des périodes de suspension du contrat de travail auxquelles la salariée a droit au titre de son congé de maternité, ainsi que pendant les quatre semaines suivant l’expiration de ces périodes (Soc. 25 mars 2015, n° 14-10.149.

D’autre part, la Cour de cassation a été amenée à préciser la notion de mesures préparatoires au licenciement, suite à un arrêt de la Cour de justice des Communautés européennes qui a énoncé que l’article 10 de la directive (CEE) 92/85 du Conseil, du 19 octobre 1992, concernant la mise en œuvre de mesures visant à promouvoir l’amélioration de la sécurité et de la santé des travailleuses enceintes, accouchées ou allaitantes au travail doit être interprété en ce sens qu’il interdit non seulement de notifier une décision de licenciement en raison de la grossesse et/ou de la naissance d’un enfant pendant la période de protection visée au paragraphe 1 de cet article, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision avant l’échéance de cette période (CJCE 11 oct. 2007, aff. C-640/06, RJS 2/08, n° 239 ; Soc. 1er févr. 2017, n° 15-26.250, qui retient qu’il est interdit à un employeur, non seulement de notifier un licenciement, quel qu’en soit le motif, pendant la période de protection visée à ce texte, mais également de prendre des mesures préparatoires à une telle décision). L’enjeu est important puisque le licenciement est nul si des mesures préparatoires sont intervenues pendant la période de protection, même si le licenciement est quant à lui notifié postérieurement.

Les hypothèses qui ont été soumises à la Cour de cassation sont évidemment très diversifiées, étant précisé que l’existence ou l’absence d’actes préparatoires à un licenciement est souverainement appréciée par les juges du fond (Soc. 14 sept. 2016, n° 15-15.943).

Par exemple, elle a énoncé qu’appréciant souverainement la portée des éléments de fait et de preuve, une cour d’appel a relevé que la simple réunion par l’employeur, au fur et à mesure de leur signalement, d’éléments relatifs aux dysfonctionnements qui étaient portés à sa connaissance ne pouvait pas être considérée comme une mesure préparatoire à un licenciement (Soc. 6 nov. 2019, n° 18-20.909). La chambre sociale a également retenu que la cour d’appel, qui a relevé, d’une part que la réorganisation intervenue au sein de la société avait été portée à la connaissance de la salariée avant son départ en congé de maternité, et d’autre part que l’employeur lui avait fait de nouvelles propositions de postes à la suite de son premier refus d’une mission nationale, a pu déduire de ses constatations l’absence de mesures préparatoires au licenciement de l’intéressée pendant la période de protection (Soc. 10 févr. 2016, n° 14-27.576). Il a également été considéré que la diffusion d’une unique annonce d’une offre d’emploi portant sur un poste d’assistante commerciale ne caractérise pas l’existence d’une mesure préparatoire au licenciement de l’intéressée (Soc. 23 mai 2017, n° 16-13.621).

À l’inverse, la chambre sociale a retenu que n’a pas donné de base légale à sa décision la cour d’appel qui a débouté une salariée de sa demande en nullité du licenciement sans vérifier, comme elle y était invitée, si l’engagement d’un salarié pour la remplacer durant son congé de maternité n’avait pas eu pour objet de pourvoir à son remplacement définitif, de sorte qu’il caractérisait une mesure préparatoire à son licenciement interdite pendant la période de protection (Soc. 15 sept. 2010, n° 08-43.299).

L’arrêt du 29 novembre 2023 fournit une nouvelle illustration des interrogations que soulève la mise en œuvre de l’article L. 1225-4 du code du travail, en retenant que « l’employeur ne peut engager la procédure de licenciement pendant la période de protection, notamment en envoyant la lettre de convocation à l’entretien préalable, un tel envoi constituant une mesure préparatoire au licenciement, peu important que l’entretien ait lieu à l’issue de cette période ».

Ce principe ne peut qu’être approuvé, tant il correspond au bon sens. Il conduit à la cassation de la décision d’appel qui avait retenu, de manière surprenante et à tort, que la salariée n’avait pu valablement se prévaloir de sa convocation à entretien préalable notifiée pendant sa période de protection, ni de la réunion des délégués du personnel pendant cette même période, pour soutenir que la décision de la licencier était déjà prise.

Notre cabinet s’est spécialisé en matière de droit du travail ; contactez-nous si vous souhaitez être défendu par un avocat consécutivement à un licenciement dans les Alpes-Maritimes.

 

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