La faute de nature à justifier la rupture anticipée d’un contrat à durée déterminée doit avoir été commise durant l’exécution de ce contrat. Il en résulte qu’en cas de faute grave avec CDD successifs, l’employeur ne peut se fonder sur des fautes commises antérieurement à la prise d’effet du dernier contrat conclu pour justifier la rupture de celui-ci (Soc., 15 mars 2023, n°21-17.227).
Les contrats à durée déterminée sont strictement encadrés par le code du travail (C. trav., art. L. 1242-1 s.). Afin d’éviter les abus et fraudes à la loi par l’employeur dans le recours aux CDD, le législateur a limité les causes de rupture anticipée (C. trav., art. L. 1243-1) et les hypothèses de contrats successifs conclus avec le même salarié (C. trav., art. L. 1244-1). Ces dispositions encadrent les cas de faute grave avec CDD successifs.
Une salariée avait été employée par une société, dans le secteur pharmaceutique, en qualité d’assistance administrative senior, dans le cadre de trois CDD successifs à partir du 30 janvier 2014.
Estimant que la salariée avait commis une faute grave avec CDD successifs, l’employeur rompit le troisième contrat de manière anticipée, arguant de faits commis au cours de l’exécution du deuxième CDD.
Invoquant l’illicéité de la rupture anticipée de son contrat, la salariée saisit le juge prud’homal afin d’obtenir le paiement d’une indemnité légale de rupture anticipée et d’une indemnité spécifique de précarité. La cour d’appel de Versailles déclara abusive la rupture anticipée du CDD et fit droit aux demandes indemnitaires de la salariée, au motif que les faits reprochés n’avaient pas été commis au cours de l’exécution du contrat rompu.
L’employeur, au soutien de son pourvoi, tentait de faire admettre à la Cour de cassation une « sorte » de continuité dans la succession des CDD, laquelle permettrait à l’employeur de prononcer la rupture anticipée du contrat en cours, pour des faits commis lors de l’exécution des précédents contrats, dès lors qu’il a découvert ces faits pendant l’exécution du dernier contrat. Au fond, le seul élément décisif serait la date à laquelle l’employeur a connaissance des faits litigieux.
La Cour de cassation devait répondre à une question : l’employeur peut-il rompre de manière anticipée un CDD pour faute grave avec CDD successifs, en raison de faits commis lors de l’exécution d’un précédent contrat, dès lors qu’il en a acquis la connaissance au cours de l’exécution du dernier CDD conclu ? Importe-t-il moins le contrat au cours duquel les faits ont été commis que le contrat au cours duquel les faits ont été révélés ?
La chambre sociale opte pour la première alternative. Rappelant le contenu de l’article L. 1243-1, alinéa premier, du code du travail énonçant les motifs de rupture anticipée du CDD – soit le commun accord, la faute grave, la force majeure et l’inaptitude constatée par le médecin du travail –, elle inscrit en principe que « la faute de nature à justifier la rupture anticipée d’un contrat à durée indéterminée doit avoir été commise durant l’exécution de ce contrat » (§ 5).
Dès lors, l’employeur ne peut se fonder sur des faits de faute grave avec CDD successifs, après la prise d’effet du nouveau CDD pour en justifier la rupture (§ 7).
La faute grave doit donc être invoquée au cours de l’exécution de ce contrat. L’employeur ne saurait attendre pour rompre. Plus encore, la décision de poursuivre les relations contractuelles avec le salarié, par la conclusion d’un nouveau CDD, ôte à la faute tout caractère de gravité.
Si la Cour de cassation avait admis la possibilité pour l’employeur d’invoquer des faits commis au cours d’un premier CDD, pour prononcer la rupture anticipée d’un deuxième CDD, elle aurait remis en cause le régime des CDD successifs, en créant un lien entre ces différents contrats successifs.
La solution serait toutefois différente si, après l’échéance du terme du contrat à durée déterminée, la relation de travail se poursuivait. En ce cas, le contrat devient à durée indéterminée (Soc. 5 oct. 2016, n° 15-17.458) et le salarié est réputé avoir occupé cet emploi à durée indéterminée depuis le début de la relation contractuelle (Soc. 6 nov. 2013, n° 12-15.953). Dans ce cas, la faute grave commise au cours de cet unique contrat à durée indéterminée pourrait justifier un licenciement disciplinaire, sous réserve de la prescription des fautes disciplinaires, soit deux mois à compter du jour où l’employeur a eu connaissance des faits fautifs (C. trav., art. L. 1332-4).
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