10 millions de français se sont retrouvés du jour au lendemain en télétravail à la suite de l’annonce du confinement lié à la crise sanitaire. Le télétravail désigne toute forme d’organisation du travail dans laquelle un travail qui aurait également pu être exécuté dans les locaux de l’employeur est effectué par un salarié hors de ces locaux de façon volontaire en utilisant les technologies de l’information et de la communication (article L.1222-9 du Code du Travail).
Ce mode de travail pose de nombreuses questions : comment le mettre en place ? Quelles sont les compensations ? Quelles sont les conditions à sa mise en œuvre ? Quelles sont les assurances nécessaires en télétravail ? Les télétravailleurs ont-ils le droit aux titres-restaurant comme les autres salariés ?
Plusieurs critères doivent donc être réunis pour caractériser le télétravail :
- Le télétravail doit utiliser les technologies de l’information et de la communication. Ce critère exclut les travailleurs à domicile (tâches manuelles effectuées à domicile) ;
- Le télétravail s’effectue en dehors des locaux de l’entreprise. Cela implique un travail effectué au domicile du salarié (domicile principal et/ou résidence secondaire) ou dans des espaces collectifs situés en dehors de l’entreprise et mis à disposition (les télécentres).
A la suite du passage au stade 3 de la pandémie du coronavirus, le télétravail est alors devenu impératif pour tous les postes qui le permettent. Chacun, employeur comme salarié, peut contribuer à lutter contre la diffusion du virus en ayant recours chaque fois qu’il est possible au télétravail. Un salarié peut donc demander à son employeur à bénéficier du télétravail jusqu’à nouvel ordre. Si son employeur lui donne son accord, cela peut se faire par tout moyen. En cas de refus, ce dernier doit être motivé.
Les salariés concernés
Le Code du travail n’exclut aucun salarié du bénéfice du télétravail : le télétravail est donc en théorie ouvert à tous les salariés.
L’accord collectif ou la charte, s’ils existent, fixent en principe les critères à remplir pour être éligible au télétravail.
L’employeur, au moment de la demande du salarié de passer en télétravail, peut refuser parce que les conditions d’éligibilité prévues par l’accord ou la charte ne sont pas réunies ou pour d’autres motifs.
Les critères de sélection doivent reposer sur des éléments objectifs et être justifiés par les conditions particulières d’exercice du travail liées au télétravail :
- Le télétravail peut être subordonné à une ancienneté minimale ;
- Le télétravail peut être exclu pour les CDD inférieurs à une certaine durée ;
- Le télétravail peut être réservé aux salariés à temps plein et à des salariés à temps partiel dont la durée du travail est supérieure à un certain pourcentage ;
- La nature du travail effectué peut être source d’exclusion du télétravail ;
- La capacité d’autonomie du salarié ;
- La configuration de l’équipe dans laquelle travaille le salarié ;
- Le télétravail est réservé aux salariés qui ont un logement compatible.
Comment le mettre en place ?
Pour la mise en place du télétravail, il existe plusieurs possibilités. Le télétravail est mis en place dans le cadre d’un accord collectif (branche, entreprise, établissement, groupe) ou à défaut d’une charte élaborée par l’employeur après avis du CSE.
Cet accord ou charte prévoit les conditions de passage en télétravail et les conditions de retour à une exécution du contrat de travail sans télétravail, les modalités d’acceptation par le salarié des conditions de mise en œuvre du télétravail, les modalités de contrôle du temps de travail ou de régulation de la charge de travail et enfin la détermination des plages horaires durant lesquelles l’employeur peut habituellement contacter le salarié.
Néanmoins, en l’absence d’accord ou de charte, l’employeur et le salarié peuvent se mettre d’accord pour le télétravail de façon occasionnel ou régulière. Dans ce cas précis, ils doivent formaliser cet accord par tout moyen (par exemple par le biais d’un avenant au contrat, des échanges de mails ou de courriers).
Les conditions d’exercice du télétravail
Lorsque que l’on a recours au télétravail, on doit être en mesure de réaliser les tâches qu’on effectue habituellement dans les locaux de l’entreprise. Il faut aussi savoir que l’employeur n’a pas l’obligation de prendre à sa charge les coûts découlant directement de l’exercice du télétravail. Pour autant, les télétravailleurs pourront répercuter sur leur employeur certains frais fixes et variables liés à l’utilisation de leur domicile à des fins professionnelles.
Lorsque le salarié est en télétravail, rien ne l’oblige à travailler depuis son domicile. Le salarié est tout à fait en droit de se rendre dans des espaces de travail partagé, comme les espaces de coworking.
Assurance en télétravail, quelles sont les règles ?
Pour les biens qui nous sont confiés par l’entreprise comme un ordinateur, casque, micro, imprimante, ceux-ci sont généralement couverts par l’assurance multirisques professionnels souscrite par l’employeur. Le salarié n’a donc pas à souscrire d’assurance pour ces éléments, celle de l’entreprise couvre tous les dommages. Cependant, pour ce qui est des biens professionnels par exemple, si le salarié utilise son ordinateur personnel ou bureau, alors il doit vérifier que son assurance habitation prend en charge les dommages survenus pour ce type de biens. Si l’assurance habitation ne prend pas en charge toute dégradation des biens personnels du salarié, même s’ils sont utilisés dans le cadre du travail, les dégradations ne seront pas couvertes.
L’employeur peut faire la demande à son salarié de l’attestation d’assurance pour le télétravail.
Les télétravailleurs ont-ils le droit aux titres-restaurant comme les autres salariés ?
Un salarié en télétravail a les mêmes droits que les autres salariés exécutant leur travail dans les locaux de l’entreprise. A ce titre, les télétravailleurs ont les mêmes avantages sociaux que les autres salariés, c’est-à-dire qu’ils ont le droit aux titres-restaurant chèques vacances s’ils sont prévus par l’entreprise (article 4 de l’accord national interprofessionnel du 19 juillet 2005). L’employeur ne peut pas décider de retirer du bénéfice du titres-restaurant du seul fait que le salarié soit en télétravail (article R 3262-7 du Code de travail).
La fin du télétravail
Cette période permet de vérifier si le télétravail est compatible avec l’organisation du travail et les compétences techniques du salarié et permet de revenir à l’organisation antérieure si elle s’avère plus adaptée.
Pendant cette période, chacune des parties est libre de mettre fin unilatéralement au télétravail en respectant un délai de prévenance préalablement défini. Le salarié retrouve alors un poste dans les locaux de l’entreprise correspondant à sa qualification.
Les conditions de retour à une exécution de travail sans télétravail doivent être prévues dans l’accord collectif ou la charte sur le télétravail.
L’employeur est tenu de « donner priorité au salarié pour occuper ou reprendre un poste sans télétravail qui correspond à ses qualifications et compétences professionnelles ». Il doit être informé par l’employeur de la disponibilité de tout poste de cette nature et bénéficie alors d’une priorité d’accès à ce poste (article 1222-10 du Code du travail).
En dehors des situations visées par la clause de réversibilité, l’employeur ne peut mettre fin au télétravail sans l’accord du salarié. Il s’agit d’une modification du contrat que le salarié peut refuser (Cass. Soc. ,12 févr. 2014, n°12-23.051).
Sources : dalloz-avocats.fr
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